vendredi 27 février 2015

Domaine Le Patriarche 14 Olingha


Des trois enfants qu'il eut avec Niangha, la deuxième, Olingha, malgré son prénom népalais, était celle qui lui ressemblait le plus physiquement. Cheveux blonds et raides, les épaules larges, un peu trop pour une fille disaient certains, de taille moyenne. Elle était très habile de ses mains, non seulement elle savait tenir un pinceau, avait pris quelques cours de dessins, mais elle démontra à son père qu'elle manipulait avec adresse la multitude de petits outils qui s'entassait dans l'atelier. C'est là que Julien rangeait sa collection, ponçait au papier de verre, teintait à la brou de noix, faisait briller les bagues en laiton.

Le jeudi, jour de congé scolaire, Olingha venait l'y rejoindre, appliquée, se penchait et, avec une peau de chamois, elle donnait du lustre à ceux qui avaient été passés à la cire d'abeille. Elle aimait les toucher, en suivre du doigt le pourtour, mettre de l'ordre sur les étagères, dérangeant l'approximatif de son père, les groupant selon leur genre, leur spécificité quand il y avait des étiquettes, variant les formes, les grandeurs. Julien laissa faire et découvrit au bout du compte que tous ces objets avaient été mis en valeur.

Sa fille lui posait maintes questions et, ne sachant pas toujours y répondre, il acheta des livres sur les outils selon les professions, une encyclopédie des outils anciens, d'artisanats disparus aujourd'hui. Ensemble ils partaient faire la tournée des fermes, des manufactures, les foires de brocanteurs, les petites boutiques, même les forgerons, les
tapissiers, ébénistes, zingueurs. Julien était très connu partout et il introduisit sa fille auprès d'anciens amis, de fermiers et tant d'autres. Il adorait avoir cette jeune présence à ses côtés, une véritable complicité qui les poussait tous deux vers un certain perfectionnisme. Au contacte de son père, elle apprit beaucoup de choses à son sujet, dont ce souvenir à jamais gravé dans sa mémoire :  Quand il faisait son école d'agriculture et qu'il avait soumis son dossier pour faire un stage, on lui avait fait remarquer qu'il devait apprendre à se vendre. Il avait répondu : « Jamais je ne me vendrai, je ne suis pas une marchandise ni un esclave, mais un homme libre, je suis fier de l'être et de le rester ! »

Après sa scolarité, Olingha eut l'idée d'ouvrir une échoppe à Yvory où elle vendait ces outils. Puis elle créa une chaîne de magasins qu'elle nomma « Olingha Outils Ô », que tout le monde appela « Oh O Ô », ou tout simplement « Les trois O » Elle engagea des vendeuses, plus un jeune menuisier qui travailla pour elle à l'atelier du Domaine Le Patriarche. L'avenir était déjà présent !







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