vendredi 10 avril 2015

Une cave-un galetas 3 La galerie


Homme aux habitudes bien ancrées, il quitta, comme chaque matin, son 3 pièces et hall vers 10h et sortit par le garage « Aux pneus tout temps ». Vêtu de son pantalon de lin vert de gris, de son polo vert olive, chaussé de ses basquettes, il allongea le pas en direction du village suivant, en passant par des chemins peu fréquentés.

A l'angle de la Grand'Rue et celle des Mousquetaires, il s'arrêta à l'auberge de la Clef et s'assit sous la tonnelle. C'était une douce journée de la mi-juin, quelques nuages blancs dans le ciel, rien de bien méchant. Trois décis de bourgogne furent déposés devant lui, pas besoin de commander, la maison le connaissait. Préoccupé par cette nuit à interrogations, il perçu très vaguement cette ombre féminine qui passa devant lui, ralentit un instant à sa hauteur, puis il entendit une voix mélodieuse réserver une table pour 6, la suivit des yeux, sans réellement la regarder jusqu'à ce qu'elle disparaisse derrière la haie de troènes. Une curiosité subite lui fit demander son nom au serveur.
  • Il s'agit d'Angela de La Tourmaline, du château du même nom, mais celui-ci vous le connaissez Monsieur Armand. Oh, excusez !
  • Pas de mal, on s'y fait, enfin je m'y suis fait, on s'adapte, il le faut, n'est-ce pas ?
  • Elle a une galerie d'art à Dijonus. Le serveur allait continuer mais fut interrompu par un « Garçon, s'il vous plait ! »

Le lendemain, Armand prit sa vieille limousine BMV noire et remarqua, en quittant le garage « Aux pneus tout temps », une petite MG décapotable rouge en stationnement devant celui-ci. Avec son but plein la tête, il continua de rouler et pris l'auto-route jusqu'à Dijonus. Déambulant dans la vieille ville, il suivit une ruelle animée, des petites boutiques aux devantures encore entourées de bois : épicerie, laverie, coiffeur avec l'inscription à demi effacée « Barbier » au-dessus de la vitrine, un bazar, une librairie, un cordonnier, enfin une enfilade de 5 vitrines à carreaux : son but. Il passa sur le trottoir d'en face pour mieux observer, sans être vu.

Demain il reviendrait et, prenant tout son courage, il entrerait. Seulement, le lendemain, la galerie était fermée. En s'éloignant du lieu, il fut subitement attiré par le nom inscrit au bas de la porte : Marie-Ange Vermeille. Ce nom, Vermeille, de Vermeille, le peintre René de Vermeille et, fichtre, se dit-il, le propriétaire de la maison qu'il avait visitée une certaine nuit. Sa collection ? Pourquoi l'avoir enlevée ? Sa fille ?

Tenace, Armand y retourna la semaine suivante. Il fut accueilli par une petite femme vive, hautement maquillée, pas la silhouette entrevue, deux fois lui semblait-t-il. Il se prit à bavarder, reconnaissant deux-trois toiles de René de Vermeille. Il était décédé 8 ans au paravant et sa fille avait donc ouvert cette galerie, entre autres pour exposer ses oeuvres. « Venez-voir au premier, Marie-Ange y présente ses propres toiles. Lentement, pas à pas, Armand se rapprocha, recula, changea d'angle, se retourna, une impression de déjà vu : un flou, une précision, une indécision aussi, des fleurs, des paysages, certes une interprétation personnelle, puis là, de loin ce qui pouvait ressembler, hum hum, à un Gauguin ? Il alla se planter devant, subjugué. Ne retrouvant pas son impression première, il regarda la signature : Marie-Ange Vermeille. C'est donc bien la fille de René. Quelle relation avec le château de La Tourmaline ?





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